Liberté solitaire

Il était encore assez tôt dans la journée lorsque Bellatrix se décida à passer par la bibliothèque alors qu'elle avait une petite heure de liberté entre deux heures de cours. Les autres Serpentard étant pris par une option qu'elle ne partageait pas, elle était donc seule en ce matin pluvieux. Habituée à la solitude et s'en accomodant bien, elle passait la majorité de ces heures d'isolement à l'endroit vers lequel elle se dirigeait actuellement. De sa démarche altière et fière, elle dominait la foule de jeunes élèves entassés devant une salle de classe, leur professeur étant visiblement en retard. Sa réputation et celle de sa famille ayant fait le tour de l'école depuis longtemps, Bellatrix se savait crainte par beaucoup d'élèves et profitait de cette peur pour accroître son pouvoir. Ainsi, lorsque ce matin, elle s'avanca au travers du groupe de troisième année, ces derniers se hâtèrent de lui créer un passage dû plus à la frayeur qu'au respect ce qui n'empêcha pas Bellatrix de regarder de haut ceux qu'elle savait de mauvaise famille ou pire d'ascendance moldue. Cependant, elle ne tenta rien de plus audacieux car déjà, elle entendait le professeur arriver. Un sang-de-bourbe aussi. Elle se demanda encore une fois comment une école aussi prestigieuse pouvait descendre aussi bas mais elle avait déjà la réponse. Dumbledore, le héros des sang-de-bourbe, Dumbledore, l'ami des Moldus. Elle retint la remarque méprisante qui tentait tant bien que mal de forcer la barrière de ses lèvres en passant près du professeur et se contenta d'ignorer d'un air hautain son salut. Phineas n'aurait jamais permis une chose pareille, Phineas Nigellus Black, l'ancien directeur de Poudlard, la fierté de la famille.

La rage et le dégoût bouillonait en Bellatrix. Elle les détestait, les sang-de-bourbe, les traîtres à leur sang. Indignes de tous les mérites auxquels ont le droit les sorciers, indignes même de seulement respirer le même air qu'elle et tous les autres sang-pur. Mais, bientôt, ce sera réglé, bientôt, les sang-pur domineront le monde magique et les autres seront esclaves ou ne seront plus. C'est en ruminant sa haine que Bellatrix poussa la porte de la bibliothèque, les poings si serrés qu'elle pouvait sentir ses longs ongles s'enfoncer dans la chair tendre de sa paume. Comme toujours, lorsqu'elle était énervée, elle semblait plus grande que d'habitude - et ce n'est pas peu dire vu sa taille déjà conséquente - et ses cheveux étaient comme mus par une énergie propre ce qui éloignait encore plus les autres. D'un pas rapide, elle rejoignit le fond de la salle là où se trouvaient les ouvrages les plus sombres de la bibliothèque. Elle sentit le regard perçant de Madame Pince dans son dos alors qu'elle faisait courir son doigt le long des livres en lisant les titres à voix basse. Elle sait que la bibliothécaire n'apprécie pas de la voir toujours traîner dans ce coin et qu'elle se doute très bien de ses tendances mais ça lui est égal. Si elle ne veut pas que les élèves consultent ces livres, ils n'ont pas à être en libre-service. En saisissant un, elle se retourna avec un sourire carnassier adressé à Madame Pince qui se détourna. Bellatrix parcourut les rayons à la recherche d'une table innocupée. Finissant par en trouver une, elle s'assit élegamment et posa le livre devant elle puis son sac où elle récupéra de quoi écrire. Ouvrant le livre qu'elle avait déjà consulté précedemment, elle se rendit directement au chapitre qui l'intéressait et commença à livre, plume à la main.

Le destin fait bien les choses, dit-on, et l'on s'accordera alors à penser que c'est ce même destin qui avait fait en sorte que Regulus se trouvait lui aussi à la bibliothèque ce jour-ci. Le jeune homme y entra quelques minutes après sa cousine et répondit à l'expression visiblement irritée de Madame Pince par un regard gelé. Evidemment, deux Black sous sa surveillance, Serpentards par dessus le marché, cela devait être bien trop dur pour la vieille chouette qu'elle était. Il jeta un coup d'oeil autour de lui et, ne voyant personne de sa connaissance, se dirigea vers une table libre. L'heure qu'il avait l'intention de passer ici était habituellement une heure d'étude qu'ils devaient passer dans la Grande Salle, mais celle-ci résonnait de bavardages qui l'empêchaient de se concentrer pleinement. Et puis, l'ambiance qui régnait ici était tout de même bien plus agréable, et l'odeur des vieux livres lui avait toujours plu.

Après s'être muni du matériel dont il allait avoir besoin, à savoir parchemin, plumes et bouteilles d'encre, le jeune Black quitta sa place pour se mettre en quête d'un livre qui lui serait sûrement utile pour faire ses devoirs. Après tout, un ouvrage complet sur la potion de Ratatinage, cela ne devrait pas être bien difficile à trouver ! Parfaitement conscient du regard suspicieux que la bibliothécaire posait sur lui - et qu'il ignora superbement, - il se faufila entre des étagères derrière lesquelles elle ne parviendrait plus à le voir. Toujours aussi aimable ! A chaque fois qu'il passait le pas de la porte, il avait l'impression que Madame Pince n'attendait que l'instant où il le passerait dans l'autre sens. Qu'est ce qu'elle croyait, qu'il allait faire exploser une bombabouse entre les livres ? Ca, c'était la spécialité de Sirius, mais sûrement pas la sienne.

La moue dégoûtée qui lui avait tordu les lèvres à la simple évocation de son aîné se mua bien vite en effarement lorsqu'au détour d'une allée, il aperçut Bellatrix. Plus instinctivement qu'intentionnellement, il fit aussitôt volte-face jusqu'à être complètement masqué par une étagère. Il se fustigea mentalement en réalisant la puérilité de sa réaction, mais cela ne délia pas pour autant son estomac que l'appréhension était venue nouer. Oh, certes, Bellatrix était sa cousine et il ne la détestait pas, il avait parfois des conversations très agréables avec elle et le respect qu'elle lui inspirait était sincère, mais la plupart du temps, le sentiment qu'elle faisait naître en lui était à peu de choses près le même que celui que ressentaient tous les élèves de l'école en sa présence : la crainte. Sirius lui faisait peur parce qu'il le faisait douter, mais Bellatrix, elle, lui faisait peur parce qu'il savait qu'il ne la connaissait pas aussi bien qu'il l'aurait voulu. La cruauté dont elle pouvait faire preuve et la folie qui brillait dans ses yeux l'effrayaient, non pas parce qu'il se demandait si elle pourrait un jour les retourner contre lui, mais parce qu'il ne savait jamais quand elle ne parvenait plus à les contenir. Il la trouvait inconstante, beaucoup trop pour son bien et celui de son entourage, et surtout, elle le connaissait mieux qu'il ne la connaissait, et il avait la désagréable impression que cela lui donnait un avantage sur lui qu'il redoutait en silence. Il voyait l'ardeur avec laquelle elle défendait la supériorité du Sang Pur comme du fanatisme, et elle devait le savoir facilement influençable, car elle parvenait toujours à détruire avec aisance les pensées un tant soit peu raisonnable que Sirius parvenait à faire naître dans son esprit.

Son frère et sa cousine étaient un peu comme sa bonne et sa mauvaise conscience, mais il n'avait aucune idée de qui écouter, et il était beaucoup plus facile pour lui de défier Sirius que Bellatrix.

Il secoua la tête et revint sur ses pas, priant pour que sa cousine ne remarquât pas sa présence. Il n'avait pas le courage de l'affronter aujourd'hui. Mais ce fut évidemment peine perdue car il trébucha sur un livre qui traînait sur le sol. Par Salazar, mais qui avait donc eu la brillante idée de le laisser là, celui-ci ? Il retint un juron et se redressa aussitôt avant de se tourner vers Bellatrix, certainement alertée par le bruit.

« Ah.. Bonjour, Bellatrix. Je ne m'attendais pas à te voir ici. »

Le mensonge et l'hypocrisie étaient, semblait-il, monnaie courante à Serpentard, et si Regulus n'aimait pas particulièrement en faire preuve, dans le cas présent, cela ne pouvait pas faire de mal.

Le livre qu'elle avait entre les mains était vieux et défraîchi à un tel point qu'elle devait se pencher sur les pages pour les déchiffrer. De plus, certaines étaient collées par une substance étrange dont Bellatrix ne souhaitait même pas connaître l'origine. Elle s'arrêta à la définition d'un sort qui, au vu de l'illustration, ne devait pas être le genre de sortilège qu'on apprenait aux élèves de Poudlard mais bien sûr, il n'était pas expliqué comment le pratiquer et le contre-maléfice était décrit un peu plus bas dans la page. Bellatrix maudissait tous ses esprits bien-pensants, elle ne trouverait pas ce qu'elle veut dans cette bibliothèque mais elle prit quand même des notes. Vu leur contenu, les élèves n'étaient pas autorisés à emprunter ces livres mais devaient les consulter sur place alors Bellatrix était obligée d'écrire dans les moindres détails ce qu'elle y trouvait. Une mesure qui s'avérait souvent inutile vu que les parchemins remplis de sa petite écriture serrée restaient souvent au fond de son sac jusqu'à ce qu'elle s'en souvienne ou qu'elle en ait besoin.

Quelques minutes plus tard, elle ferma le livre et alla le remettre à sa place pour en saisir un autre. Etonnée de ne pas sentir le regard froid de Madame Pince dans son dos, elle se retourna pour vérifier ce qui la distrayait. L'objet de ces regards furieux lui était caché par une étagère de livres mais il ne faisait aucun doute que la personne était dans son collimateur et qu'elle n'était pas plus ravie de la voir que Bellatrix. Cette dernière retourna s'asseoir, partagée entre le contentement de voir la vieille bibliothécaire retourner ses aigreurs contre quelqu'un d'autre et le souhait intrigué de savoir qui se montrait encore plus déplaisant qu'elle à Pince. Elle resta quelques minutes à l'affût avant de plonger dans son nouveau livre mais à peine avait-elle baissé la tête qui lui sembla aperçevoir une personne de sa connaissance. Mais, le temps de confirmer cette vision, elle avait disparu pourtant elle était quasiment sûre d'avoir vu Regulus, son cousin. Enfin, hallucination ou non, elle avait la sensation que ce dernier avait une fâcheuse tendance à disparaître lorsqu'elle entrait dans son champ de vision. Ca ne serait pas le premier mais elle n'avait pas le même comportement avec lui qu'avec les autres alors elle ne comprenait pas sa réaction.

Elle chassa la vision de son cousin de son esprit et se remit à lire mais elle eut à peine le temps d'oublier Regulus que celui-ci se montra au coin d'une étagère ou plutôt aurait essayé de disparaître à nouveau si un livre n'avait pas rencontré sa route ce qui l'a fait trébucher et à son grand malheur, vu l'expression de son visage, a alerté la moitié de la bibliothèque et surtout sa cousine. Bellatrix remarqua le changement dans le visage de Regulus lorsqu'il se retourna pour la regarder, se recomposant une expression pour ne pas donner l'impression qu'il a tenté de la fuir une nouvelle fois. Le pauvre Regulus ne s'était visiblement pas attendu à devoir faire face à sa cousine aujourd'hui et dût trouver rapidement quelque chose à dire et s'embrouilla lamentablement en la saluant. Bellatrix ferma son livre et inclina légèrement la tête avant de lui répondre.

Sûrement que tu ne t'attendais pas à m'y voir, je n'y passe que quelques heures par jour après tout ...

Bellatrix eut un sourire hypocrite envers son cousin. Elle ne comptait pas lui parler de ses soupçons sur ses disparitions soudaines mais elle ne manquerait quand même pas une occasion de le sous-entendre.

Alors, comment vas-tu Regulus ? Ca fait longtemps que je ne t'ai pas vu ...

Regulus n'était pas dupe, sa lamentable tentative visant à faire croire à sa cousine qu'il venait tout juste de l'apercevoir avait échoué. Il garda malgré tout une allure qui se voulait décontractée : maintenant qu'il avait été découvert, il était hors de question de se défiler comme un lâche. Son regard parcourut les étagères qui entouraient la jeune femme. Il connaissait cette section, il savait aussi que Madame Pince n'appréciait pas du tout de voir des élèves de Serpentard y traîner, mais cela ne l'étonnait que moyennement de trouver sa cousine par ici. Il ne put s'empêcher de se demander pour quelle raison exactement elle s'adonnait à des recherches par ici, mais au fond, il se dit qu'il ne préférait pas savoir. Cela vaudrait sûrement mieux pour tout le monde ! Il se rapprocha encore un peu de la table où Bellatrix travaillait, puis haussa les épaules à sa remarque.

« Oh, tu me connais, il me faut toujours un certain temps pour me remettre totalement dans le bain des études.. Mais ça va. »

L'espace d'un instant, le jeune homme fut tenté de faire part à Bellatrix de sa dernière confrontation en date avec son frère aîné, mais il jugea finalement préférable de s'en abstenir. Il n'y avait rien d'intéressant à en tirer, et il n'avait pas envie de passer une fois de plus pour plus faible qu'il ne l'était. La haine qui opposait Sirius à Bellatrix était presque devenue légendaire au sein de Poudlard, et c'était dans ces rares occasions qui opposaient son frère et sa cousine qu'il se rendait compte à quel point la relation qu'il qualifiait de chaotique qu'il vivait avec son aîné n'était rien, mais alors rien du tout comparée à celle qui existait entre la jeune femme et le Gryffondor. Quelque part, tout au fond de lui, il ne pouvait s'empêcher d'en tirer une certaine satisfaction, sans vraiment savoir pourquoi.

Il pencha légèrement la tête sur le côté, presque comme à chaque fois qu'il s'apprêtait à poser une question.

« Et toi ? Les Professeurs ne vous noient-ils pas sous le travail, avec les ASPIC en fin d'année ? » s'enquit-il tranquillement.

Sur ce point, Regulus s'estimait encore chanceux : les BUSE ne viendraient que l'année prochaine, il avait encore le temps avant de devoir affronter les révisions et le stress des examens. Enfin, si d'autres y étaient parvenus avant lui, il n'avait aucune raison d'échouer !

Lorsque Regulus se rapprocha de la table, elle saisit le regard qu'il lança sur la rangée de livres devant laquelle elle se trouvait. Visiblement, ça le mettait assez mal à l'aise, une réaction assez peu compréhensible de la part d'un Serpentard et encore moins d'un Black à part pour certains traîtres à leur sang bien sûr. Elle espérait que les idées de l'ami des Sang-de-Bourbe qui lui sert de frère n'avaient quand même pas commencé à envenimer son esprit. Regulus avait toujours était plus faible et facilement influençable, encore plus de par son jeune âge, et Bellatrix n'aimait pas trop voir Sirius tourner autour de lui de peur que son manque de respect envers sa famille n'influençât son frère. Et le fait que Regulus la fuyait à chaque instant n'a fait que la conforter dans cette idée. Il faudrait qu'ils abordent ce sujet mais plus tard car Regulus ne semblait pas dans son assiette malgré ce qu'il disait. Son cousin était comme tout bon Serpentard, légèrement menteur sur les bords mais n'a jamais été très bon dans cet exercice et elle savait que ce n'était pas les études qui lui donnaient cet air dépité. Cependant, Bellatrix passa sur ce sentiment, si il ne voulait pas parler, ce n'est pas elle qui l'y poussera. Et elle n'eut d'ailleurs pas besoin de lui répondre puisque Regulus brisa le silence lui-même en lui posant une question, toujours sur les études. Pas son sujet préféré mais elle répondit quand même aimablement à son cousin.

Et bien, il y a beaucoup de travail, c'est sûr ... Mais, tu sais bien que je n'appartiens pas à ce genre d'élève qui se plaint de la quantité de travail donné. Nous sommes dans une école après tout, pas une maison de repos !

Bellatrix avait légèrement retroussé le nez avec une expression proche du dégoût en prononçant ces mots. Bien sûr, les premières personnes à qui elle pensait en disant ça étaient les Gryffondor qui croyaient toujours que tout allait leur tomber tout cru dans le bec. Et, elle pensait donc par extension au frère de Regulus, la honte de la famille de par son entrée à Gryffondor six années auparavant. Elle avait du se retenir pour ne pas rajouter un venimeux "comme ton frère" à la fin de sa deuxième phrase. Elle n'était pas d'humeur à s'attaquer à son autre cousin aujourd'hui même si comme à chaque fois qu'elle pensait à lui, elle sentit qu'un mouvement de colère montait en elle et que des mots désagréables brûlaient ses lèvres. Au lieu de ça, elle décida de s'orienter vers un autre sujet qui constituait une des premières cibles de ses piques assassines : l'enseignement donné à Poudlard.

C'est vrai, la quantité m'importe peu mais elle m'importerait encore moins si l'enseignement ici ne s'avérait pas aussi inepte. On nous considère encore comme des enfants. J'ai déjà eu le droit à une retenue, rien que ce mot me fait rire, que croient-ils ? Quelques lignes à copier, des chaudrons à récurer et on aura changé de point de vue ? Ca, c'est bon pour les faibles, ceux qui ne s'accrochent pas à leurs idées. Et tu veux savoir qui m'a donné cette retenue ? Ce Sang-de-Bourbe de prof de Défenses contre les Forces du Mal et ce uniquement parce que soi-disant "mes idées vont à l'encontre de celles de Poudlard" ...

Bellatrix produisit un son semblable au sifflement d'un serpent avant d'émettre un léger rire ironique. Elle s'était de nouveau emportée comme à chaque fois qu'elle parlait de Poudlard qui, dans sa tête, était pervertie par les idées du saint Dumbledore. Elle essaya de se calmer pour ne pas effrayer encore plus son cousin mais ses ongles s'étaient à moitié enfoncés dans la table sans qu'elle puisse se contrôler.

Un sourire typiquement Serpentard vint arquer ses lèvres à mesure qu'il écoutait les propos de sa cousine. S'il y avait bien un point sur lequel il n'éprouvait jamais le besoin de la contredire, c'était bien lorsqu'elle critiquait la façon dont était gérée cette école. Regulus n'avait jusque là jamais eu de problèmes avec l'autorité, et on ne l'avait encore jamais envoyé en retenue, parce que Walburga Black avait mis un soin tout particulier à lui rentrer dans le crâne qu'on devait se soumettre à l'autorité. Le jeune homme mettait ces principes en pratique, et bien que la seule autorité qu'il reconnût pleinement et presque aveuglément était celle de ses parents, cela ne l'empêchait pas de savoir où était sa place. Malheureusement, il n'était qu'un élève, et bien peu semblaient accorder de l'importance à la place de Directeur de Poudlard qu'avait occupée Phineas Nigellus, un de ses illustres ancêtres. Cela ne leur conférait-il pas une place à part au sein de ce collège ? Ils n'étaient pas n'importe qui. Ils étaient des Black. Bellatrix, elle, n'hésitait jamais à le rappeler, que ce soit aux élèves ou aux professeurs et pour cette même raison, Regulus la respectait infiniment.

Il poussa un soupir faussement dépité et secoua la tête, puis vint s'appuyer nonchalament contre la table sur laquelle travaillait sa cousine.

« Eh oui, que veux-tu.. Parfois, je me dis que nous aurions dû être élèves ici du temps de notre ancêtre, Phinéas. »

Un très grand Directeur, comme le lui avaient souvent répété ses parents. La conversation ayant dévié sur le professeur de Défense contre les forces du mal, il continua dans ce sens, une moue dégoûtée sur le visage :

« Ce Newton.. Lorsqu'il aura fini de charmer toutes les adolescentes de l'école, il prendra peut-être le temps de nous apprendre quelque chose d'utile. »

Le dédain perçait nettement dans sa voix. C'était peut-être son professeur, et il lui témoignait un respect feint, mais il lui était insupportable. Vu son jeune âge, on se demandait comment il pouvait avoir acquis suffisamment d'expérience pour leur enseigner à se défendre contre les « Forces du Mal ». Ce terme était tellement réducteur ! Comme si on pouvait définir en deux catégories bien distinctes, le Bien et le Mal, toutes les créatures, les opinions, les actes, les sorts auxquels on pouvait se trouver confronté sur terre !

Bellatrix se calma très vite à la mention de Phineas. Si elle attachait une importance plus qu'éxagérée à la pureté de son sang, elle en attachait encore plus à cet éminent membre de sa famille. Le dernier directeur de Poudlard issu de Serpentard, ce n'était pas rien. Et elle partageait les idées de son cousin, si c'était lui le directeur, cet école ne serait pas sur la pente glissante de la décadence. Mais, le comble de cet honneur était que la seule raison pour les Black d'étudier à Poudlard était le fait que Phineas Nigellus avait été à sa tête des dizaines d'années auparavant. Si seulement il pouvait voir comment son école avait changé ... Plusieurs fois dans sa scolarité, Bellatrix avait pensé à rejoindre Durmstrang pour ses études. Beaucoup de rumeurs couraient à propos de cette école, notamment qu'on y enseignait la magie noire et même si elles n'étaient pas forcément toutes fondées, rien ne pouvait être pire que ce château sordide. Sortant de sa rêverie, elle continua à écouter son jeune cousin. Elle ne fut pas étonnait de sa réaction par rapport à ce Sang-de-Bourbe de Newton, son succès auprès de la gente féminine était la première chose qui lui était rapproché par les élèves de l'autre sexe. Malgré le dégoût et le dédéin feints par Regulus, elle crut déceler un léger soupçon de jalousie dans ses paroles. Ce n'était pourtant pas les filles de Serpentard qui couraient après Newton et son cousin savait très bien ce qu'il risquait à fréquenter une fille d'une autre maison. Il ne voulait pas finir rayé de l'arbre généalogique comme son idiot de frère. En parlant de Sirius ... Un léger sourire carnassier se dessina sur les lèvres de Bellatrix. Si Newton faisait tomber les filles, il n'était pas le seul et le frère de Regulus avait acquis cette solide réputation depuis quelques années. Elle ne louperait pas cette occasion de le rappeller à son cousin cette fois.

Il n'y a pas que lui qui charme les adolescentes ... j'imagine que tu vois de qui je veux parler ...

Son sourire ironique s'élargit sur son visage. Regulus détestait parler de son frère, elle le savait mais c'était plus fort qu'elle. Après tout, c'était peut-être la personne qu'elle haïssait le plus dans cette école et elle avait un besoin presque instinctif de le rabaisser à chaque instant. Elle n'aimait pas les Gryffondor mais un Gryffondor traître à son sang, le sang de la famille des Black, c'était trop pour elle, elle pouvait à peine supporter qu'on prononce son nom devant elle. Elle laissa répondre son cousin, elle s'attendait à deux réactions soit il s'éloignait du sujet soit il attaquait de front.

« Malheureusement, je ne le vois que trop bien, » répondit-il d'un ton irrité.

Il ne tenait pas à parler de Sirius. Leur dernière confrontation lui restait encore en travers de la gorge et, lui qui était habituellement calme et discret s'était montré d'une humeur de chien pendant plusieurs jours. Cela avait au moins eu le mérite de faire réaliser aux premières années qui l'avaient croisé qu'il était un Black, et qu'il n'était pas le charmant et calme jeune homme dont son visage lui donnait trop souvent l'air. Sa langue avait été aussi acérée que les crochets d'un serpent et même quelques élèves - plus jeunes - de sa propre maison en avaient fait les frais. Non, il ne tenait définitivement pas à parler de Sirius, c'était un terrain bien trop dangereux et incertain sur lequel il était préférable de ne pas s'engager. Et pourtant, Regulus savait parfaitement à quel point Bellatrix haïssait son frère aîné. Elle le haïssait bien plus que lui, d'ailleurs, et c'était peut-être pour cela qu'il ne voulait pas en parler avec elle, craignant de ne pas se montrer assez hargneux au goût de sa cousine, ou de laisser le doute planer quant à la véritable profondeur de son aversion pour son frère.

Il secoua la tête et répondit d'une voix traînante, espérant que cette déclaration viserait à clore le sujet :

« Ce n'est pas vraiment l'affection de nos parents qui l'étouffe lorsqu'il revient à la maison.. Je présume qu'il doit essayer de compenser ce manque autrement. »

Un sourire mauvais joua sur ses lèvres closes. A l'inverse de ce que pouvait penser Bellatrix, Regulus ne ressentait aucune jalousie envers Newton. Mais envers son frère, oui. Il haïssait cette aisance avec laquelle son aîné attirait le regard, suscitait l'admiration et le respect de tous et s'entourait d'une foule d'adolescents envieux de pouvoir dire qu'ils étaient des "amis de Sirius Black". Il secoua la tête pour chasser ces pensées désagréables.

« Et comment va Narcissa ? La vie de Poudlard ne doit pas trop lui manquer, je suppose.. » demanda-t-il pour changer de sujet.

Visiblement, Regulus avait opté pour la première option. Il sembla profondément agacé du sujet que Bellatrix avait abordé. Peut-être s'était-il une nouvelle fois disputer avec son frère. En tout cas, il tourna court la discussion avec une petite remarque sarcastique à l'égard de celui-ci avant d'enchaîner avec une question visant à éloigner Bellatrix du sujet. Si celle-ci avait été d'humeur plus belliqueuse ou si ça n'avait pas été son cousin en face d'elle, elle n'aurait pas lâcher le morceau aussi vite mais elle ne voulait pas encore ternir les relations qu'elle entretenait avedc Regulus. Alors, elle le laissa orienter la conversation vers sa soeur Narcissa. Sa soeur préférée et à l'entendre dire, son unique soeur. Jamais Bellatrix n'évoquera Andromeda sauf si on lui en parlait et c'est souvent avec un profond air de dégoût et de mépris qu'elle envoyait balader la personne lui demandant des nouvelles de cette traître à son sang. En effet, étant depuis le début contre les idées de sa famille, elle avait poussé le vice jusqu'à se mettre à fréquenter un moldu depuis quelques temps et pas plus tard qu'hier, elle avait envoyé une lettre à sa famille pour les prévenir qu'ils se marieraient. Vu les lettres que lui avaient envoyé sa mère et d'autres personnes, elle ne devait pas être la seule à être plus que furieuse, elle n'imaginait même pas l'état dans lequel devaient être ses parents qui avait tant espéré qu'elle se remette dans le bon chemin. De ce côté-là, ils n'avaient pas à s'inquiéter pour Narcissa, elle avait toute leur approbation pour son futur mariage programmé depuis des années avec un sang-pur et son futur ne ferait que la fierté de sa famille et de sa soeur, notamment. Cette dernière s'empressa donc de le rapporter à son cousin.

Narcissa se porte mieux que bien. Comme tu le sais, elle va bientôt annoncer son mariage avec Lucius Malefoy. Au grand plaisir de nos parents.

Elle marqua une pause avant de continuer. Ce qu'elle avait à dire ensuite lui semblait bien plus important qu'un simple mariage d'intérêt. Et elle n'était sans doute pas la seule àç penser ça. Ce n'était pas le mariage de sa soeur qui faisait la une des journaux depuis quelques temps. Oh, comme elle se sentait partagée entre le bonheur qu'elle ressentait pour sa soeur d'avoir fait le bon choix et la jalousie que celle-ci l'ai fait avant elle. Elle savait au fond d'elle que sa soeur ne l'avait fait que pour plaire à Lucius alors qu'elle, elle ne rêvait plus que de ça, elle serait la plus dévouée, la plus obéissante. Et elle était retenue dans ce stupide château parce qu'elle devait finir ses études selon ses parents. Mais, qu'est-ce que des BUSE ou des ASPIC pour le futur qu'elle se réservait ? Rien de plus que du vent et elle devait perdre une année avant de réaliser ses rêves et de transformer ceux des autres en cauchemars ...

Et, bien sûr, cela signifie qu'elle va Le rejoindre.

Bellatrix avait de nouveau cette lueur de folie dans le regard et la joie et l'excitation semblaient s'échapper de chaque pore de sa peau à Son évocation. Plus qu'une année à attendre ...